L’élan joyeux
L’élan joyeux, solitaire, de la danse sous les fleurs du cerisier pendant les années de guerre oppressantes de ma petite enfance est devenu un jour –jour de la Libération, fin de la guerre- explosion de joie de tout un quartier.
On avait mis des planches sur une charrette comme scène pour les musiciens, avec tous ces instruments que je voyais pour la première fois, accordéon, clarinette… ; nuit ensoleillée où je découvre qu’on peut danser ensemble, tous les enfants, les voisins, les parents, les grands-parents, rire tout fort et être heureux. Les bals de fin de semaine ont continué dans les granges, les salles des fêtes effondrées.
En moi, « danse » et « libération » se sont là, liées.
Après les tangos, les rocks, le chant, l’école de danse d’expression, la danse avec les africains du foyer dans lequel je travaille, j’entre un jour dans le studio de Malkovsky. J’y retrouve la sensation de liberté de l’enfance et la découvre, cette fois, intérieure. A ce moment-là, dans la société rigide et figée où bouillonne le ferment politique de mai 68, je travaille comme psychologue en psychiatrie. Je danse avec Malkovsky à Paris, avec ses élèves à Lyon et Dijon.
Devenue paysanne, je retrouve les bals, folks cette fois. La danse de Malkovsky s’ancre dans ma vie au cœur de la nature, de ses rythmes, au cœur de la sensorialité de la terre, du troupeau, de la laine, de la soie.
1978 , c’est à moi maintenant de transmettre la danse. Ma « terre de danse » est la Drôme ; je continue à apprendre ailleurs.
2003, dans ce temps socialement plus difficile et éclaté, la Toscane m’offre une deuxième terre. La Danse Libre y fait son chemin.
Ce sont des associations, prenant le relais l’une de l’autre, qui ont permis cette transmission : MJC de Crest, …Et qui danse, Du Souffle au Chant, Scenica Frammenti, ORISS, Des Ronds dans l’Eau, Les Pieds sur Terre, Renc’Arts . A elles, mes remerciements.
C’est de la vie, de la nature, de professionnels, de voisins et amis, de tous ceux qu’on appelle parfois « mes élèves » que j’ai appris et apprends la danse. A eux mon respect.
Andrée Edel